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Empowork, pour en finir avec l'emploi précaire et renforcer la CultureVue en plein écran


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Romain Boonen, instigateur d'Empower Culture, ici en 2022, mixant lors de sa résidence au KulturA, à Liège.

Riche du soutien de la Région de Bruxelles-Capitale, Empowork Culture est sur les rails pour constituer un groupement d'employeurs qui aura pour mission d'engager du personnel en CDI, de le former et de le mettre à disposition de ses membres.


C'est une secousse sismique, l'embryon d'un probable séisme sur le marché de l'emploi dans la Culture: l’association Empowork Culture vient d'empocher les 100.000 euros mis en jeu par "Prove your social innovation", un appel à projet initié par Innoviris, l'institut pour la recherche et l'innovation en Région bruxelloise.


Hippie chic aux allures de poète épicurien, Romain Boonen a le sourire. Normal, l'instigateur d'Empowork Culture, c'est lui. "Il s'agit d'un organisme de partage de compétences et de connaissances pour le secteur culturel", annonce cet ingénieur du son et gestionnaire événementiel freelance, actif au sein de la scène musicale indépendante belge depuis plus de 12 ans. "Nous avons pour objectif de former un groupement d'employeurs: une structure qui a pour mission d'engager du personnel en CDI, de le former et, surtout, de le mettre à disposition de ses membres."


Les membres en question, ce sont les opérateurs du secteur: des salles de concert, des festivals, des théâtres, mais aussi des cinémas ou d'autres associations qui s'activent dans le vaste monde des arts de la scène. "C'est un milieu dans lequel les conditions de travail sont compliquées", analyse le porteur du projet. "Le plus souvent, les structures culturelles passent par des contrats précaires ou s'en remettent à des travailleurs indépendants, même pour des postes clés, notamment ceux liés à l'administration, la production ou la communication. Pour l'essentiel, ce sont des ASBL qui n'ont ni les moyens ni les besoins d'engager du personnel dans de bonnes conditions d'emploi. Les festivals de musique, par exemple, ne sont actifs que quelques mois par an. Par la force des choses, ils ont recours à des freelances."


ROMAIN BOONEN FONDATEUR D'EMPOWORK CULTURE: "Le plus souvent, les structures culturelles passent par des contrats précaires ou s'en remettent à des travailleurs indépendants, même pour des postes-clés."

Empowork Culture compte opérer un changement de paradigme. "Nous voulons mutualiser des profils professionnels et devenir une force structurante pour l'emploi dans le secteur culturel."


Constituée en vue d’opérer un véritable tournant, l’association Empowork Culture compte quelques personnalités de poids au sein de son conseil d’administration. On y retrouve notamment Pablo Fleury, de l’ASBL Court-Circuit, le pôle des musiques actuelles en Fédération Wallonie-Bruxelles, mais aussi Sarah Bouhatous, la coordinatrice de Scivias, la plateforme institutionnelle qui impulse un changement pour un secteur de la musique plus inclusif en Belgique francophone ou, encore, l’ancien directeur artistique du Dour Festival Alex Stevens, qui s’affaire à présent dans l’économie sociale, ainsi qu’à la tête de la start-up Music Data Studio.


Optimisation des ressources


Reconnu dans la législation belge, le groupement d'employeurs est un système par lequel des entreprises établies dans un même secteur d'activité s'associent pour occuper des travailleurs à temps plein. Une société d'assurance, par exemple, a besoin d'un comptable chaque lundi. Une autre recherche le même profil, mais, cette fois, pour les mardi et mercredi, tandis qu'une troisième se focalise sur les derniers jours de la semaine.


À force d'additionner les temps partiels, il est possible d'arriver à un plein-temps. "C'est un dispositif que l'on retrouve notamment dans le monde agricole ou dans l'enseignement. Voilà maintenant trois ans que j'étudie la possibilité de transposer ce modèle aux réalités du paysage culturel", explique Romain Boonen. À 31 ans, ce dernier a déjà connu plusieurs vies. "De formation, je suis ingénieur du son. Je travaille en studio et sonorise de nombreux spectacles. Je me suis également occupé de la direction artistique d'un bar du centre-ville bruxellois. Cette fonction m'a confronté à de multiples aspects liés à la gestion et à l'organisation de concerts."


ROMAIN BOONEN FONDATEUR D'EMPOWORK CULTURE: "Nous voulons mutualiser des profils professionnels et devenir une force structurante pour l'emploi dans le secteur culturel."

En mars 2020, toutefois, le plan de carrière de Romain Boonen prend une autre tournure. "La pandémie a mis l'Horeca et la culture à l'arrêt. D'un coup, je me suis retrouvé sur le carreau." Pour éviter de perdre son temps, il entame alors un master en gestion à Solvay, du côté de la VUB (Vrije Universiteit Brussel). "Dans le cadre de mon mémoire, j'ai cherché à répondre aux problématiques du secteur culturel, mais avec des outils managériaux que l'on rencontre plutôt dans des branches commerciales, généralement tournées vers une optimisation des ressources."


C'est comme ça qu'il en vient à la question de l'emploi. "Toucher à la mutualisation des ressources humaines, ça permet d'assurer la stabilité des organisations, mais aussi de protéger l'emploi. J’y ai vu l'opportunité de développer un groupement d'employeurs dans le paysage culturel."


Programme de recherche  


Empowork Culture entame sa mission sur un terrain vague. "Chez nous, il n'existe aucun groupement d'employeurs dans le secteur culturel", précise Romain Boonen. "En revanche, le modèle existe ailleurs, notamment en France." Du côté de Toulouse, le groupement d'employeurs OPEP s'affaire depuis le printemps 2005. À ce jour, il rassemble une cinquantaine d'adhérents, tous secteurs culturels confondus, et emploie 24 salarié·e·s, dont 18 sont en CDI et 6 en CDD.


À Bordeaux, l'emploi partagé gagne aussi l'économie créative et le secteur culturel. La société AGEC & CO peut ainsi se targuer de réunir une cinquantaine de contrats bétonnés sous son toit. "Légalement, en Belgique, un groupement d'employeurs est limité à 50 personnes employées. Si nous voulons devenir une force structurante pour le secteur culturel, ce chiffre doit être un objectif. Mais avant d'en arriver là, nous allons mettre à profit les 100.000 euros remportés via l'appel à projet. Cet argent va servir à élaborer un programme de recherche qui, dans un an, aboutira à des engagements concrets. Nous voulons développer un modèle raisonné, en phase avec les réalités du secteur."


Romain Boonen: "Si l’emploi se renforce et se stabilise, nous aurons réussi"

Désormais soutenue par la Région de Bruxelles-Capitale, l’initiative Empowork Culture envisage de réinventer l’emploi dans la Culture. Comment et avec quels outils? Éléments de réponse en compagnie du cerveau des opérations, Romain Boonen.


Empowork Culture entrevoit la création d’un groupement d’employeurs dans le paysage culturel. Quelles sont les principales caractéristiques de ce secteur?


Romain Boonen: C’est un pôle professionnel truffé de jobs précaires et de fonctions payées au lance-pierre. Pour s’en sortir, de nombreuses associations s’en remettent à des travailleurs indépendants qui, dans bien des cas, occupent des fonctions à responsabilités. Le secteur culturel belge se distingue aussi par une carence dans le domaine des ressources humaines. Les petites structures n’ont pas les moyens de rémunérer une personne à ce poste. Par conséquent, les travailleurs sont rarement aiguillés dans leurs trajectoires professionnelles. Sur les questions de formation, notamment, c’est le vide intersidéral.


La formation, justement, est-elle un axe essentiel dans la mise en œuvre d’un groupement d’employeurs?


Si nous voulons mutualiser des emplois dans le secteur culturel, c’est fondamental. Dans un premier temps, notre travail va se concentrer sur des profils liés à l’administration, la communication, la production et la gestion de projets. Pour que notre modèle soit crédible et efficace, ces jobs partagés doivent être assurés par des personnes ultra-compétentes. Cela passera notamment par une formation aux nouvelles technologies et à l’intelligence artificielle. Nous voulons garder l’humain au centre.


Mais pour générer de l’emploi de qualité, il est nécessaire d’intégrer l’IA et l’automatisation là où c’est possible. Dans le secteur culturel, comme ailleurs, certaines tâches administratives prennent un temps fou. Nous voyons l’IA comme l’opportunité de diminuer la charge mentale qui pèse sur certaines fonctions du secteur. Grâce à ces nouveaux outils, il sera possible de faire des gains en productivité et d’améliorer les conditions d'emploi.


Comment allez-vous mettre en place le premier groupement d’employeurs dans le secteur culturel?


Pour répondre précisément à cette question, il y a beaucoup d'informations à recueillir en amont. Cela fait déjà trois ans que je sonde les besoins du secteur. Le soutien financier de la Région bruxelloise va maintenant donner un coup d’accélérateur au projet. Empowork entre dans une nouvelle phase. Nos douze prochains mois seront consacrés à une réflexion de fond qui nous permettra d’opter pour la meilleure solution. Nous allons analyser le marché à l’aune de quatre volets.


ROMAIN BOONEN FONDATEUR D'EMPOWORK CULTURE: "Notre logique n’est pas celle de l’emploi intérimaire. Ici, l’idée est de bétonner des engagements en CDI."

Dans un premier temps, il faut se pencher sur les besoins structurels du secteur. Pour savoir quelle organisation a besoin de quelles compétences pour occuper quel poste, à quel moment. Le deuxième axe de l’étude touche à la question de l'égalité des chances et de la qualité de vie au travail. À partir du moment où l’on partage des employés entre différentes organisations culturelles, on ne peut prendre le risque d’écarteler les travailleurs sans soupeser ces questions.


Le troisième point concerne la méthodologie du travail dans les entreprises culturelles. L’idée, c’est de comprendre comment l’information circule entre les différents pôles de compétence. C’est ici que l’IA prend tout son sens. Car nous voulons nous assurer que les employés partagés soient actifs sur des tâches pour lesquelles ils ont une vraie valeur ajoutée. Enfin, le quatrième pan de l’étude est de nature économique. Il faut déterminer un mode de financement adéquat et propre au groupement d’employeurs dans le secteur culturel.


À ce titre, quel est le modèle économique préconisé par Empowork Culture?

Notre logique n’est pas celle de l’emploi intérimaire. Ici, l’idée est de bétonner des engagements en CDI. La mise en œuvre d’un tel dispositif de jobs partagés implique d’importants frais de gestion. Des frais que nous ne pouvons pas répercuter intégralement sur nos membres, sous peine d’échouer. Si nous voulons que les entreprises culturelles adhèrent au projet, elles doivent y trouver leur compte. Ça ne doit donc pas leur coûter plus cher d’engager un employé qu’un indépendant.


Dans un premier temps, nous devrons certainement compter sur un soutien public pour financer les charges relatives à la gestion administrative. Ici, il est important de souligner que notre initiative joue sur plusieurs tableaux. Puisque la culture est une compétence communautaire, tandis que l’emploi relève des Régions et du Fédéral. Pour l’instant, notre travail se concentre sur Bruxelles-Capitale. Car c’est la région qui concentre le plus grand nombre d’organisations culturelles. À terme, cependant, nous souhaitons créer des antennes dans toutes les régions du pays.


Sous ses aspects positifs, le modèle défendu par Empowork Culture ne risque-t-il pas de mettre sous pression les employés partagés entre les différentes entreprises?

Ça ne peut pas être pire qu’aujourd’hui. Car, pour l’instant, cette réalité est celle de nombreux indépendants qui, en plus d’être sous pression, n’ont quasi aucune protection sociale. Avec Empowork, nous avons l’opportunité de mettre à mal l’emploi précaire. Nous avons la possibilité de structurer le secteur, en remplaçant des postes de freelance par des contrats à durée indéterminée. Ce qui implique évidemment des congés payés, des tickets restaurant et d’autres avantages propres à ce régime professionnel.


ROMAIN BOONEN FONDATEUR D'EMPOWORK CULTURE: "Pour générer de l’emploi de qualité, il est nécessaire d’intégrer l’IA et l’automatisation là où c’est possible."

Empowork Culture va jouer un rôle d’interface entre ses employés et les structures qui s’abonnent à ses services. Mais pour que cela fonctionne, il faut mettre au point des règles spécifiques au secteur culturel. C’est tout l’objet du programme de recherche que nous entamons. L’année prochaine, nous aurons établi une charte de mise à disposition. Les entreprises qui rejoignent le groupement d’employeurs devront ainsi s’engager à respecter une série de règles pour permettre la bonne organisation du travail.


Sur quel segment culturel allez-vous concentrer vos premiers efforts?


À l’origine, notre modèle est profilé pour les habitudes du secteur musical. Mais à force de rencontrer des acteurs de terrain, des administrations et des politiques, nous réalisons que la formule peut s’appliquer à tout le paysage culturel. L’objectif final d’Empowork Culture, c’est vraiment de renforcer l’ensemble du secteur. C’est la raison pour laquelle nous sommes organisés en ASBL. Notre but n'est pas de concentrer des richesses, de capitaliser sur le dos des entreprises ou des travailleurs. Si l’emploi se renforce et se stabilise dans l’ensemble du secteur culturel, nous aurons réussi notre mission.

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